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vivre livre
20 juillet 2010

Chapitre 3

Vincent passa le reste de la journée à regarder la mer et à lire un roman d'espionnage. La veille de son départ, vaguement angoissé par cette rupture franche de son quotidien pour aller vers l'inconnu, il avait songé qu'un roman à suspens serait un bon compagnon de voyage et musellerait ses peurs. Il avait donc acheté un livre de John Le Carré chez le libraire en haut de sa rue et l'avait glissé dans ses bagages. A présent, il alternait lecture dans sa cabine et montée sur le pont où il restait immobile dans le vent, les yeux tournés vers les vagues, et ne parvenait pas à se défaire de l'impression qu'une main allait à nouveau se poser sur son bras. Il pensa à Marie presque à chaque instant, en scrutant la mer, en tournant les pages, en montant et descendant les escaliers. Il ressentait tour à tour de l'attachement pour elle, une aigreur vive lorsqu'il pensait à son mari, une certaine oppression devant l'étrangeté de ces retrouvailles parce qu'une part de lui-même refusait la coïncidence.

Le soir arriva, et à l'heure dite Vincent se trouvait sur la passerelle. Ne sachant très bien comment il devait se présenter, il avait opté pour une chemise beige et un pantalon gris, ni chic ni trop décontracté. Marie ne tarda pas à le rejoindre et le guida, joyeuse et légère, jusqu'à la cabine du capitaine. En y entrant, ils croisèrent une vieille femme noire qui sortait avec un petit paquet à la main.

L'homme était attablé, attendant qu'on lui apporte le menu du jour. Il avait les cheveux bruns et la peau bronzée et portait son uniforme de travail. Lorsqu'il se leva pour le saluer, Vincent découvrit qu'il était étonnamment grand au point que le sommet de sa tête frôlait le plafond de la cabine. Il s'appelait Edward et s'exprimait avec un accent anglais. Tous trois s'assirent et entamèrent le repas qui leur fut servi après quelques minutes d'attente.

- Donc, tu pars en Irlande! lança Marie, le regard pétillant.

Vincent se sentait gêné comme si elle lui était inconnue, comme s'il se trouvait en face de deux juges.

- C'est cela, dit-il. J'avais besoin de changement.

Il trouvait que leur regard était empreint d’indulgence. Marie lui semblait plus distante qu'elle ne l'avait jamais été, malgré ses nombreux sourires et sa bonne humeur. Soudain, on frappa à la porte et un vieil homme entra. Il avait de longs cheveux blancs et portait un béret à la main. Il était assez pauvrement vêtu. Il s'adressa à Edward dans une langue que Vincent ne parvint pas à identifier. Le capitaine le salua, se leva et prit un livre qu’il lui tendit. L’homme remercia et sortit. Mais que se passait-il donc sur ce ferry ?

L’incursion de cet homme fut l’occasion pour Vincent de remarquer la bibliothèque d’Edward, des rayonnages de bois neuf remplis de livres, une bonne centaine sans doute, dans des langues diverses, certains même en alphabet cyrillique, d’après les inscriptions qu’il pouvait apercevoir sur la tranche. Dérouté, Vincent reporta ses pensées sur la conversation qu’il avait eue avec Marie et se décida à lui demander comment elle savait qu’il avait renoncé à un autre voyage. Il était temps en effet de lever un coin du voile et d’apaiser son sentiment de malaise.

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Commentaires
C
Es-tu toujours à Avignon??? Si oui, quelle chance !!!!plus que qqqles jours... je te conseille la pièce suivante : Oeidipe de Voltaire <br /> http://www.caspevi.com/oedipe-de-voltaire/<br /> mon ancien prof de théâtre joue dedans : Antoine Herbez. Tu peux le saluer pour moi :-)Les critiques semblent très bonnes.<br /> Bises,
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